Mon travail s’inscrit dans une disponibilité à tout ce qui peut se présenter dans l’espace pictural. Ainsi, je mise avant tout sur l’expérience de faire naître l’image plutôt que sur le résultat tangible.
Aucune conceptualisation ne précède cette aventure visuelle. Je compose d’abord avec une pléthore d’inscriptions plastiques peu contrastées; un relatif chaos qui s’ordonne lentement, par sacrifices, mais sans jamais s’immobiliser complètement. Dans cette mouvance, les images qui se révèlent ne m’apparaissent que comme des traces momentanées d’une transformation potentiellement infinie; un état, un moment de la matière qui devient présence de l’indicible.
Donc, il s’agit, pour moi, d’être à l’écoute de quelque chose d’inexprimable qui, à travers l’aléatoire du geste, laisse parfois sa marque sur le support. Ainsi, je déplace et j’accumule la matière jusqu’à sentir une résonnance, une immédiateté de l’image. Lorsqu’une représentation émerge, c’est bien parce qu’elle paraît nécessaire puisqu’intimement liée au ressenti qui se dégage de l’ensemble. C’est une représentation partielle et allusive qui provient toujours des accidents de la matière.
Ce qui m’interpelle, c’est d’abord la lumière. L’usage du noir, du blanc et des infinies nuances de gris me semble la manière la plus directe d’obtenir ces clairs-obscurs qui me font vibrer. Le contraste se produit alors dans une lente accumulation de nuances. Il en ressort un monde d’atmosphère et de flou, d’incertitude et d’illuminations où l’obscurité est potentiel de silence, de mystère et de profondeur insondable.
Être là, à l’écoute de l’inimaginable, voilà le seul et paradoxal programme de cette peinture aux horizons improbables.