Les quatre temps du processus créateur

Dans tout processus créateur, nous distinguons quatre étapes qui s'appliquent assurément à la démarche artistique de l'atelier Sfumato:

1- Recherche de la problématique

Au départ du cheminement créateur, la personne est nécessairement investie du désir de résoudre une certaine problématique, quelle qu'elle soit. Dans le cas de l'artiste, ce qui est en question c'est, bien sûr, la création d'une œuvre d'art, cela entendu au sens large. Il y a donc, au fondement du geste créateur, une motivation affective efficace, un engagement suffisant pour aiguillonner l'artiste à jouer le jeu et le pousser à prendre le risque que comporte toute nouveauté.

2-L'éloignement

La deuxième étape est affaire d'attitude créative. C'est le moment où l'on se met en position de jeu, d'ouverture à la découverte. Afin de dépasser la paralysie, on met de côté tout jugement. Ainsi, on tente d'ouvrir une porte qui donne sur sa créativité. À ce moment précis de la démarche, l'artiste accepte de jouer le jeu et s'engage résolument à dire « OUI » à tout ce qu'il va produire.

Ensuite, vient le moment « sauvage » de la création. À ce stade, on opère un grand brassage (d'idée, de matières, etc.) lors duquel on ne se pose aucune question, ni ne pose aucun jugement. Au choix, on dépose, brasse, souille, barbouille, grafigne, déchire, manipule, etc. Il ne s'agit pourtant pas d'un simple défoulement; on demeure toujours présent à notre action. Le tout se déroule avec une attitude de jeu jouissif digne de l'enfance. La difficulté, à cette étape de désordre apparent, c'est de tolérer l'ambiguïté de ne pas savoir vers quoi on s'en va. Il faut pourtant mettre la réflexion et l'analyse entièrement de côté afin de s'abandonner complètement à déposer une trace vivante sur le support.

 

Dessin de Diane Goudreau
Dessin de Diane Goudreau

 

Peinture de Mona Gregori

Peinture de Mona Gregori

 

3- L'élaboration

Après ce grand brassage, vient l'étape dite de « décodage » ou « d'élaboration ». Suite à la frénésie du jeu, le processus ralenti et le créateur se calme tout en demeurant encore ouvert à toutes les possibilités. L'artiste au regard rêveur se sert de son intuition afin de discerner un potentiel de direction dans ce qui a été déposé. Le risque, à ce stade, c'est de paniquer devant tant de choix possibles et de s'accrocher à la première réponse qui surgît, comme pour se débarrasser au plus vite de ce qui est ressenti comme une « patate chaude ». Si le créateur demeure calme, confiant et ouvert, il peut reconnaître et valoriser le potentiel qui se trouve ce qui a été déposé sans jugement. Intuitivement, l'artiste devine une tendance générale et commence, d-o-u-c-e-m-e-n-t, l'accentuation et la réalisation de son travail. Au présent stade de l'élaboration, le ressenti (« feeling ») devient clair alors que la forme est encore floue. Délicatement, on commence à tracer et reconnaître son chemin. L'élaboration est aussi le moment où peut se produire l' « eurêka », la révélation.

4- La réalisation. L'affirmation.

Dorénavant, le créateur donne une forme plus définitive à son œuvre. L'artiste matérialise son ressenti et affirme son image. Cette concrétisation se fait humblement, patiemment, selon les limites techniques du pratiquant de l'art. Le défi, à ce moment de la création, est mettre son savoir-faire toujours au service de son ressenti, de son « feeling ». Arrivé à cette phase, le danger qui guette le créateur est celui de tuer l'œuvre en la travaillant trop. La réalisation est l'étape où l'artiste objective et communique sa vision tout en préservant l'intégrité de son ressenti d'origine.